LE CORONAVIRUS AU SECOURS DU DÉLAI DE RÉTRACTATION

 

 

Le contenu de cet article n’est plus d’actualité dans la mesure où l’article 2 de l’Ordonnance n°2020-427 du 15 avril 2020, publiée au Journal Officiel du 16 avril 2020, exclut du champ d’application de l’Ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 les « délais, de rétractation ou de renonciation ».

 

Par conséquent, les délais de rétractation en matière de vente immobilière ne sont pas suspendus en raison du Covid-19.

 

 

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Les mesures de lutte contre la propagation du Covid-19, prises par le gouvernement français, ont, de manière temporaire, changé les règles du jeu en matière de délais des procédures judiciaires.

 

L’article 11 de la Loi d’urgence n°2020-29 du 23 mars 2020 dispose que :

 

« I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances, dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure, pouvant entrer en vigueur, si nécessaire, à compter du 12 mars 2020, relevant du domaine de la loi et, le cas échéant, à les étendre et à les adapter aux collectivités mentionnées à l’article 72-3 de la Constitution :

 

(…)

 

2° Afin de faire face aux conséquences, notamment de nature administrative ou juridictionnelle, de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation, toute mesure :

 

(…)

 

b) Adaptant, interrompant, suspendant ou reportant le terme des délais prévus à peine de nullité, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, déchéance d’un droit, fin d’un agrément ou d’une autorisation ou cessation d’une mesure, à l’exception des mesures privatives de liberté et des sanctions. Ces mesures sont rendues applicables à compter du 12 mars 2020 et ne peuvent excéder de plus de trois mois la fin des mesures de police administrative prises par le Gouvernement pour ralentir la propagation de l’épidémie de covid-19 ».

 

L’étendue de ces mesures a été précisée par une Ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période, publiée au Journal Officiel de la République Française du 26 mars 2020.

 

Son article 1er énonce que :

 

« I. ‒ Les dispositions du présent titre sont applicables aux délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l’article 4 de la loi du 22 mars 2020 susvisée.

 

II. ‒ Les dispositions du présent titre ne sont pas applicables :

 

1° Aux délais et mesures résultant de l’application de règles de droit pénal et de procédure pénale, ou concernant les élections régies par le code électoral et les consultations auxquelles ce code est rendu applicable ;

 

2° Aux délais concernant l’édiction et la mise en œuvre de mesures privatives de liberté ;

 

3° Aux délais concernant les procédures d’inscription dans un établissement d’enseignement ou aux voies d’accès à la fonction publique ;

 

4° Aux obligations financières et garanties y afférentes mentionnées aux articles L. 211-36 et suivants du code monétaire et financier ;

 

5° Aux délais et mesures ayant fait l’objet d’autres adaptations particulières par la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 ou en application de celle-ci.

 

III. ‒ Les dispositions du présent titre sont applicables aux mesures restrictives de liberté et aux autres mesures limitant un droit ou une liberté constitutionnellement garanti, sous réserve qu’elles n’entrainent pas une prorogation au-delà du 30 juin 2020 ».

 

L’article 2 de l’Ordonnance du 25 mars 2020 précitée a circonscrit tous les actes et démarches concernés par ces dispositions, et notamment :

 

« Tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d’office, application d’un régime particulier, non avenu ou déchéance d’un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période mentionnée à l’article 1er sera réputé avoir été fait à temps s’il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois.

 

Il en est de même de tout paiement prescrit par la loi ou le règlement en vue de l’acquisition ou de la conservation d’un droit ».

 

La question s’est posée de l’application de ces mesures sur le délai de rétractation de dix (10) jours en matière de vente immobilière qui venait à échéance pendant la période d’urgence sanitaire.

 

Pour rappel, l’article L. 271-1du Code la Construction et de l’Habitation offre, aux termes de ses alinéas 1 et 2, un dispositif de protection de l’acquéreur potentiel d’un bien immobilier en lui conférant le droit de renoncer au contrat sans encourir de pénalités :

 

« Pour tout acte ayant pour objet la construction ou l’acquisition d’un immeuble à usage d’habitation, la souscription de parts donnant vocation à l’attribution en jouissance ou en propriété d’immeubles d’habitation ou la vente d’immeubles à construire ou de location-accession à la propriété immobilière, l’acquéreur non professionnel peut se rétracter dans un délai de dix jours à compter du lendemain de la première présentation de la lettre lui notifiant l’acte.

 

Cet acte est notifié à l’acquéreur par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par tout autre moyen présentant des garanties équivalentes pour la détermination de la date de réception ou de remise. La faculté de rétractation est exercée dans ces mêmes formes ».

 

Ainsi, celui-ci bénéficie d’un délai de dix (10) jours à compter de la notification du compromis de vente, soit par Lettre Recommandée avec Accusé Réception, soit par intervention d’un Huissier de Justice.

 

Cet acte peut également être remis directement à l’acheteur contre émargement.

 

En tout état de cause, le délai de dix (10) jours commence à courir à compter du lendemain de la première présentation de l’acte.

 

Pour se prévaloir de son droit à rétractation, l’acquéreur devra adresser un courrier à son vendeur, en Recommandé avec Accusé de Réception, l’informant de son souhait de renoncer à la vente.

 

À défaut, le vendeur aura la possibilité :

 

      soit de résoudre la vente, aux torts exclusifs de l’acquéreur, assortie de dommages et intérêts en indemnisation de l’immobilisation du bien immobilier ;

 

      soit de poursuivre judiciairement la vente, aux frais de l’acquéreur, assortie également de dommages et intérêts pour le préjudice éventuel subi.

 

La liste importante des actes concernés par les mesures prises par la Loi d’urgence n°2020-29 du 23 mars 2020 et l’Ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 ne laisse aucun doute sur le fait que le droit à renonciation de l’article L. 271-1 du Code la Construction et de l’Habitation bénéficie de ces aménagements :

 

« Tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement (…) ».

 

À cet égard, celui-ci ne fait pas partie des exclusions mentionnées au paragraphe II de l’article 1er de l’Ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020.

 

Par ailleurs, ces dispositions ne s’appliquent qu’aux délais de rétractation qui ont expiré ou qui expirent à partir du 12 mars 2020, soit des compromis de vente de vente qui ont été, non pas signés, mais notifiés à l’acquéreur, au plus tard, le 1er mars 2020 et ce, pour une période, à ce jour, indéterminée.

 

Par conséquent, ces aménagements ne concernent pas les délais de renonciation qui sont arrivés à expiration avant le 12 mars 2020.